“ L’ Artiste qui refusait de stagner…”
Il n’est désormais plus question de s’interroger sur la carrière solo
de Steven WILSON, chef de file de la mouvance prog d’aujourd’hui. On ne
fera donc plus non plus le récapitulatif de son travail multi
directionnel, par souci d’économie de temps, et de place. Le voici
aujourd’hui à la tête d’un groupe, presque comme nouveau, maintenant
rompu à la scène (et de quelle magistrale façon !). L'ami Steven s'est
adjoint pour la première fois les services d’un deuxième guitariste, la
baffe, tout comme le reste des musiciens, je vous renvoie au line-up en
bas de cette page . Ce troisième album solo marque cette fois une
véritable rupture stylistique avec PORCUPINE TREE, pour s’en éloigner
de plus en plus. C’est que le bonhomme est passé par les bandes
remixées (par ses soins) de quelques monuments du prog des origines (ça
non plus on ne citera pas !). Et finalement ça devient de nouveau un
vrai bonheur de chroniquer un groupe que l’on pourrait qualifier de…
neuf ! On va donc pouvoir s’adonner à la récitation des innombrables
références musicales qui se succèdent ici, dénichées au fur et à
mesures des écoutes. Oui car depuis un bon moment, difficile de parler
des albums de WILSON autrement qu’en citant WILSON justement !...
La dernière tournée avait déjà dévoilé un premier morceau, que l’on
retrouve évidemment, dès l’entrée du disque : « Luminol ». Première
tuerie, augurant de tout ce qui viendra : groove syncopé, riff
éclatant, ultra mélodique, mellotron, impro clavier analogique saturé,
façon jazz rock (WEATHER REPORT, Brian AUGER, ELEPHANT 9), pause hyper
planante avec folk des grands espaces, chœurs CROSBY STILLS NASH &
YOUNG, flûte splendide (plus tard sax), fluide au possible, guitare
jazz, digressions symphoniques à faire pâlir GENESIS ou YES, breaks
Tulliens, ambiances fantomatiques et pesantes très GOBLIN et ANEKDOTEN,
coolitude piano bar, et final romantique absolument dantesque, bref… !
N’en jetez plus ! Bienvenus en terre prog ! L’âge d’or à son apogée… La
suite est un festival de pur génie, égrainant autant de contes
tragiques et bigarrés de qui vous savez (le titre de cet album est sans
équivoque), et expose avec une maestria ahurissante cette déclaration
sans borne au rock progressif, ce maelström de la toute fin des années
60, qui fusionnait alors psychédélisme, musique classique et jazz. "The
Raven That Refused To Sing" (le corbeau qui refusait de chanter) est,
croyez-le bien, indispensable ; en ce sens qu’il propose une musique
actuelle, absolument contemporaine, et non passéiste, il ne singe pas,
il transcende ! Faites donc écouter ça à n’importe qui, les MUSE, les
COLDPLAY, KEAN, ARCHIVE et compagnie, tous ces gros monstres de stade,
ils vont en tomber à la renverse… non, en fait, tout le monde, pas
qu’eux !
Le niveau de jeu et de jam est saisissant, exceptionnel, tout là-haut,
au côté des très grands, et les deux dimensions , entre sens de
l’écriture et sens de l’exploration libre, se fondent à merveille, sans
faire preuve de vain élitisme. Vous y verrez de nombreuses joutes entre
guitares et claviers, laissant place parfois à de sacrés coups de
boutoirs de la basse. La batterie est diabolique, mais ça vous le
saviez déjà, n’est-ce pas ?... Je refuse aussi de m’engager à décrire
chaque pièce de cette expo sonore, chaque tableau, chaque sculpture
musicale, tant l’imaginaire y est stimulé, entraîné, contrasté, secoué,
éthéré, enrobé, ou déchaîné, transfiguré certainement. N’ayons pas peur
de le dire, ce disque est un chef d’œuvre des années 2010 (merde ! je
l’avais déjà dit du précédent !), peut être LE « Dark Side Of The Moon
» de notre début de siècle…! Il ne se vendra certainement pas autant
que cet aîné, mais franchement, on s’en fout ; il a des siècles devant
lui, à la même place que les OUI, rois cramoisis et autres boîte à
musique… Il semble, par dessus le marché, nous dire que tout ça n’est
qu’un début, la suite ne s’envisageant d’emblée que comme une
fantastique parade colorée et inoubliable. Pour parachever le cortège
des gloires revisitées, je finirai en citant aussi quelques
accointances ici avec CAMEL, les BEATLES, VAN DER GRAAF GENERATOR,
MOODY BLUES, DEEP PURPLE, RADIOHEAD, MOGWAI, et sans doute encore
d’autres, que j’ai dû rater, car ils hantent tous successivement ce
disque… "The Raven That Refused To Sing" propose six morceaux, d’une
durée chaque fois bien respectable…ça fait trois pièces par face, si
j’ai bien compris ?... Là encore, ça fleure le parfum de pochette
vinyle, le livret ouvragé, et l’objet existe en différentes versions,
entre galette, coffret spécial 120 pages et visuels multiples, j’en ai
les cheveux qui poussent, et les chevilles qui dépassent !
Un jour, vous vous souvenez, WILSON a déclaré : « je ne fais pas du
prog ». Mon œil… !
Un chef d’œuvre.
Chroniqueur : CHFAB
Line-up
Steven Wilson - Vocals, Guitars, Keyboards
Guthrie Govan - Lead Guitar
Nick Beggs - Bass Guitar
Marco Minnemann - Drums
Adam Holzman - Keyboards
Theo Travis - Saxophone, Flute
Tracklist
01. Luminol (12:10)
02. Drive Home (7:37)
03. The Holy Drinker (10:13)
04. The Pin Drop (5:03)
05. The Watchmaker (11:43)
06. The Raven That Refused To Sing (7:57)
Site officiel :
www
Pays :
ANGLETERRE