NOOUMENA – Argument With Eagerness (décembre 2011)
http://www.nooumena.bandcamp.com
Label : Antithetic Records
France
Track list :
1- Nameless Reward (07 :35)
2- Decadence (07 :28)
3- Bygone Ages (06 :49)
4- Le Plouc (06 :59)
5- Lucidity (06 :44)
6- Cold Comfort (02 :24)
7- Somehow (06 :10)
8- Taedium Vitae (11 :05)
Line-up :
Pierre Blin : Drums, Percussions
Thibault Geay : Vocals, Artwork
Maxime Métais : Guitars, Saxophone
Simon Toralba : Bass, Counterbass
Guests : Samuel Frin : Saxophone
Etienne Briand : Trombone
Simon Deslandes : Trumpet
Jocelyn Debart : Violin
Xavier Sichel : Alto violin
Marc Eurie : Cello
« Raison et états d’âme »
Cocorico ! Voilà encore ici le témoignage d’une créativité bien de
chez nous, incarnée par ce groupe cannais fondé en 2004(1ère démo en
2007) et ce premier album officiel, pré-écoutable sur internet, dans
son intégralité. Une démarche économique et écologique très louable,
d’ailleurs de plus en plus répandue.
Les étiquettes (il en faut bien !) choisies et donc acceptées par
le quatuor sont : ambient, artrock, expérimental et progressif…
Voilà qui déjà augure une musique ambitieuse, changeante, surprenante à
n’en pas douter. Le propos ici (faire de la musique ressort toujours
d’un point de vue, d’une idée, d’un choix, parfois à l’insu ou au
démenti de beaucoup d’artistes) est d’exprimer le ressenti humain, dans
une « tentative consciemment illusoire », je site le groupe.
Bien sûr, à cet énoncé, on peut aussi craindre un travail tout empêtré
dans les méandres du discours et de la technique, dépourvu d’âme et
d’émotion… Il n’en est rien ici, malgré quelques fulgurances atonales,
concrètes et free (déjà annoncées), voilà un album généreux, bourré de
force, à fleur de peau, de folie, de beauté, bardé de paysages
étonnants, parfois hallucinés, entre colère et mélancolie, comme un
état des lieux des excès humains sous toutes leurs formes, comme
l’illustre si bien la superbe toile de la pochette. Découvrir
« Argument With Eagerness », c’est avoir le goût indubitable
pour l’aventure et le voyage, sans se soucier réellement de sa
destination. C’est au fond ce qui peut résumer les motivations de tout
amateur (éclairé ou pas finalement) de musiques dites progressives,
non ? Progression, évolution, transformation, exploration.
Les influences visibles de NOOUMENA sont à piocher dans les musiques
nouvelles, le jazz, le prog, la Zeuhl, le math rock, le Doom (1), le
post rock, bref, tout est prétexte à explorer, tant le champ des
passions humaines semble inépuisable… On y croisera Zappa, pour ses
orchestrations et son ironie (borborygmes chantés), ou bien Gong, King
Crimson pour ses apesanteurs jazz, ses entrelacs, sa folie également,
Steven Wilson pour ses raz de marrée rythmiques, Opeth pour quelques
growls, Oceansize pour ses arabesques, toute la clique scandinave pour
sa retenue et sa mélancolie si profonde, et puis les ténors du post
rock… Sans doute mille autres références se révèleront au fur et à
mesure, au sein d’une musique qui se réinvente à chaque croisée, pour
des chemins tous plus addictifs les uns que les autres, car vous verrez
qu’ici, il n’y ait pas de limite envisagée… Ainsi chaque morceau est
abordé comme un tout, ne se voulant pas forcément miroir de ce qui
précède ou va suivre.
Le chant masculin, en anglais (plutôt convenable), épouse méandres et
mélopées, souvent en octave, donnant une couleur hantée toute
particulière. Le niveau des musiciens est formidable et l’inspiration
très souvent de haut niveau (à peine déplorera-t-on quelques
longueurs). On pourrait tout à fait évoquer une sorte d’ADN combiné
entre [bleu] pour l’émotion et Jack Dupon pour la folie débridée (tous
deux frenchies !), mais au fond, ce serait bien réducteur, tant
NOOUMENA déroule son propre univers… Conclusion: pour les
inconditionnels du couplet refrain, des nappes de clavier
omniprésentes, et des mélodies identifiables, le périple sera peut être
éprouvant, on peut le comprendre, mais pour les autres, c’est un
splendide mariage entre émotion et agitation cérébrale. Un coup de
maître.
A Caen la suite ? (pas pu m’empêcher)
¾
CHFAB