DAVE WILLEY & FRIENDS – Immeasurable
Currents (2011)
http://www.myspace.com/quasidayroom
Label : Altrock Records
USA
Tracks :
1- Too Much Light (3 :47)
2- The Old Woods (5 :45)
3- If Two See A Unicorn (1 :57)
4- What A Night (4 :02)
5- The Conservatives (1 :50)
6- Winter (3 :22)
7- I Could Eat You Up (3 :36)
8- Wordswords (5 :39)
9- Autumn (3 :18)
10- Mitch (2 :57)
11- A Garland Of Miniatures (2 :40)
12- Nightfall (4 :30)
Line-up :
Dave Willey : Accordion, Guitars,
Guitarron, bass, Drums,
Keyboards, Piano, Organ, harmonium,
Percussion,
Mailing Tubes, Backing Vocals, Vocals, Bells, Zither, Whistling, Horsey
Deborah Perry : Vocals, Percussion
Elaine Di Falco : Voice, Piano, Droplets
Hugh Hopper : Bass, Loops
Mike Johnson : Guitars
Dave Kerman : Drums (I Could Eat You)
Farrell Lowe : Guitar (The Old Woods)
Wally Scharold : Vocals (The Conservatives)
James Hoskins : Cello (Winter)
Emily Bowman : Viola (Winter)
Mark Harris :Clarinet (Winter)
Bruce Orr : Bassoon (Winter)
Hamster Theatre : Vocals for Loops (Nightfall)
« Le Charme Discret De La Boulderoisie »
Altrock Records n’en finit pas de mettre à jour les pépites R.I.O. du
monde entier(savant mélange entre classique, modal, contemporain, jazz,
rock et pop), démontrant, une fois n’est pas coutume, qu’en dehors des
autoroutes la vie se fait autrement plus exaltante. Voici donc une
occasion supplémentaire, avec ce « Immeasurable Currents »,
de se réjouir d’avoir choisi la départementale ! Car c’est encore
un bijou qui vous attend à la prochaine halte.
Dave WILLEY est un étonnant touche à tout installé (depuis bien
longtemps déjà, semble-t-il) dans le Colorado, dans la ville de Boulder
(d’où le jeu de mot avec le titre de cette chronique). Il est déjà,
bien avant ce disque, le bassiste de THINKING PLAGUE (renouveau R.I.O.
made in USA, dans les années 90), le fondateur de HAMSTER THEATRE, il
participe aussi à THE CORVETTES (groupe d’impros), TIN BOX, UNNAMED
PROJECT, sans citer ses innombrables collaborations avec la danse, la
musique gipsy ou Balkane, et autres formations encore, au sein de sa
ville de résidence…n’en jetez plus !...
Avec un CV pareil, il y a de quoi être franchement intimidé. De
plus, Thinking Plague ne représente pas ce que la musique (et le rock
en particulier) offrent de plus…comment dirais-je…rassembleur,
harmonieux et rassurant… ! En tous cas c’est mon souvenir (je n’ai
pas beaucoup écouté), alors : quid de cette joyeuse bande
(joyeuse, on sait pas encore !) ?
Et bien la surprise est de taille. Voici-là un véritable petit chef
d’œuvre de sensibilité collective, au cœur même de l’élégance british,
école « Canterbury » en tête, toue en finesse, très loin de
l’exubérance démonstrative du modèle américain (comme il l’est bien
souvent). En effet, cet album est un délice de chaque instant, dominé
par l’accordéon du maître (et oui !), insufflant douceur, chaleur
et humanité (en plus d’une réelle originalité) à un jazz pop
expérimental splendide. Ambiances feutrées, oniriques, émues,
sarcastiques, tel est le menu concocté ici.
Jazz, tout d’abord, pour les sonorités choisies ; batterie
toute en finesse et cymbales, guitares au son dépouillé, harmonies
complexes, digressions à l’humeur improvisée. Pop, de par la présence
vocale de Deborah PARRY et Elaine Di Falco, insufflant, à l’instar
d’Amanda PARSONS (National Health), de splendides mélodies caressantes,
avec cette qualité de voix sans artifice (pas d’effet de théâtre, pas
de vibrato volontaire), mais ô combien brillante (simple n’est pas
simpliste !), dans ses mélopées enjôleuses, et presque enfantines.
On navigue ainsi dans les plus belles eaux (elles sont innombrables) de
Robert WYATT ; même sensibilité fragile, rêveuse, planante… Tout
comme lui (se connaissent-il ?), la versatilité de WILLEY le
pousse aussi à varier ses atmosphères (contemplatives, espiègles,
abstraites, inquiètes…), les sonorités (psaltérion, sifflets, orchestre
de poche, percus), et les rythmiques, tout au long des 12 pièces
courtes constituant ce raz du coup aux mille perles…Oui, ici, la
beauté, le ravissement, et les émotions les plus ténues n’en finissent
pas de vous étreindre, à la manière des modernes du vingtième siècle
(Debussy, Satie, Ravel, Weil, Picasso, Mondrian, Apollinaire, Breton…),
comme un étrange rappel des temps à venir, bouleversés et funestes…Il
faut dire que l’intégralité des textes a été puisée dans le répertoire
poétique de feu le père de Dave Willey (Brent). Pour les rapprochements
actuels, on songe aussi à Tom Waits (la mise en son organique), parfois
à Léonard Cohen (les nappes, la gravité). Enfin, sachez que Dave KERMAN
et le très regretté Hugh HOPPER sont aussi de l’aventure, comme ça, en
visite, presque en voisins… Les compositions sont d’une rare splendeur,
envisagées comme de vrais poèmes (et pour cause !), chacun ayant
sa vie propre, et plus j’écoute ce disque, plus je me dis qu’on le
situe en Europe, et non outre atlantique (y a qu’à voir la photo de
Willey dans le livret ; un vrai gentleman d’université, dans son
cottage imaginaire…), tout près, si près des rivages de la triste et
singulière Albion… Voilà une œuvre profondément émouvante, racée,
élégante…A masterpiece.
Would-you mind passing me the tea and pour some drops of ink in
it ?
Magnifique.
CHFAB
4/4