Alfie Ryner – Brain Surgery
Pour Neoprog
Rédigé par CHFAB le 15/07/2015
Genre CD
Groupe Alfie Ryner
Album Brain Surgery
Label Atypeek Music
Année 2014
Raging Chicken - instrumental
Douanier - audio
Brain Surgery - audio
Hypnose - instrumental
No Hay Mas - audio
Gradation - audio
Formation en 2006
Membres : Loris Pertoldi [batteur], Guillaume Gendre [contrebasse],
Paco Serrano [chanteur,saxophone], Guillaume Pique [trombone], Gérald
Gimenez [guitariste], Arthur Ower [son]
http://www.alfieryner.com
“Toujours nécessaire, toujours extra large…”
Alfie Ryner est un trompettiste fictif, derrière lequel se cache une
formation française basée à Toulouse, et ayant débuté en 2006.
Après deux albums studio (Memorial I en 2010 et II en 2012), voici donc
leur troisième opus. Le combo se compose de cinq musiciens; saxophone
et voix, trombone, guitare, contrebasse, batterie. Personne ne sera
surpris, à cet énoncé, de découvrir que le quintette fricote sévère
avec le jazz, mais c’est bien compter sans le rock. Pourtant, la
musique d’Alfie Ryner ne pratique pas le jazz rock, ni la fusion, mais
plutôt une sorte de rock d’avant garde, entre rio, jazz (effectivement)
et expérimental déclamé.
Autant le dire tout de suite, Brain Surgery est une excellente
surprise, le genre d’album qui vous attrape par les synapses, la moelle
épinière, et vous fait faire des grands huits, avec la tête comme avec
les jambes! C’est un disque très complet, équilibré, offrant folie
furieuse, gravité, contemplation, et le tout avec un talent de chaque
instant tant on a l’impression, dès la première écoute, qu’on assiste à
quelque chose de fort dans le temps. Rien que l’ouverture du disque
suffit à vous plonger d’emblée en des territoires inconnus et
prégnants, bruits de chaînes à l’appui...
De l’avant garde, on y reconnaîtra assez facilement le choix
d’ambiances atonales, parfois sombres, échevelées, ou en demie teinte
(splendide pause à la contrebasse sur Brain Surgery), et avec quelques
respirations expérimentales, en ponctuation des pièces de résistance
(formidables ondes et radiations sonores, exsangues et contaminées!)…
Le Rio s’y épanouit lors d’agencements harmoniques tendus, ou
dissonants, sombres, sans pourtant rendre la chose absconse cependant,
toujours au service soit d’une pulsation (souvent irrésistible), soit
d’un développement progressif (on est pas là par hasard!).
La fibre rock s’exprime par des saillies rageuses, syncopées, des
ambiances électriques dans la lignée du meilleur King Crimson, que ce
soit dévolu aux guitares ou aux cuivres, le cousinage étant parfois
indéniable.... On ne s’en plaindra pas, tant la comparaison en terme de
qualité les honore.
Pour finir, l’expérience théâtrale, un atout particulièrment fort sur
cet album (est-ce le cas pour les précédents?), qui réside dans
l’expression de textes particulièrement réussis et frappants, français
ou anglais, au ton et aux sujets âpres, subversifs, ironiques, déclamés
avec beaucoup de conviction par le joueur de saxophone, Paco Serrano,
dont l’accent américain du sud ajoute à une faconde tout à fait
percutante. Il faut l’entendre singer la mégalomanie meurtrière et
autosuffisante dans le deuxième morceau appelé Douanier. Un très grand
moment.
Le jazz, enfin, comme évoqué dès le départ, prend sa part grâce au
saxophone, parfois en rythmique, telle une seconde guitare, ou à
l’unisson avec le trombone, l’un comme l’autre proposant également de
magnifiques soli, qui prennent le temps de servir la musique. Chacun
dialogue, ou surplombe, à l’intérieur de structures plus écrites qu’il
n’y paraît… Un régal.
Il va de soi que tous les musiciens sont du niveau qu’exige une musique
comme celle-ci: précis, transcendés, impliqués, à l’écoute. Avec Alfie
Ryner c’est la musique qui est au centre de tout, et à aucun moment
elle apparaît démonstrative, ou élitiste, ou bavarde. A cet égard, on
peut la rapprocher d’un Moraine par exemple, d’un Karda Estra ou d’un
Light Coorporation. C’est une musique qui fait preuve d’espace, de
puissance, et d’extrême finesse, chaque séquence étant dotée d’un
véritable sens de l’à propos. Des compositions finalement simples,
lisibles, et toujours surprenantes. On y retrouvera le goût des riffs
assassins, des glissements de rythmiques l’une dans l’autre, des
accents métal, des échappées space, en plus du jazz évidemment. Mais
retenons-le, c’est plus que tout cela à la fois, car ce groupe défend
un vocabulaire qui lui est propre, et qui saura séduire un public bien
plus large que prévu.
Un constat qu’on ne peut que saluer avec enthousiasme, pour un des
meilleurs albums de l’année.
Facebook : https://www.facebook.com/AlfieRyner
Discographie :
2010
Memorial I
2012
II
2014
Brain Surgery